ACTUALITÉ
Ouverture du marché de l’assurance emprunteur

Bilan en demi-teinte

Depuis l’entrée en vigueur de la loi Lemoine en 2022, la substitution, par un contrat moins cher, de l’assurance emprunteur souscrite auprès de la banque s’est simplifiée. Mais le nombre de contrats souscrits dans un autre établissement que la banque qui a accordé le prêt immobilier a peu augmenté. En outre, de nouvelles pratiques inquiètent quant aux assurances accordées sans questionnaire médical. Explications.

L’avancée sur le front de l’assurance emprunteur n’est pas aussi nette que l’assure le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) dans son dernier rapport. Cette assurance dont le coût peut représenter jusqu’à la moitié des intérêts du crédit couvre les risques de décès, invalidité et incapacité de travail durant la durée de remboursement du crédit. Elle est généralement moins chère lorsqu’elle est souscrite auprès d’un assureur alternatif et non auprès de la banque qui a accordé le crédit immobilier (contrat groupe).

Or pendant longtemps, les établissements bancaires ont multiplié les obstacles pour empêcher l’ouverture du marché à la concurrence malgré l’adoption de cinq réformes législatives. Selon le CCSF, les banques accepteraient désormais beaucoup plus facilement les demandes de substitution du contrat groupe par une assurance alternative, la majorité des dossiers seraient acceptés et environ 60 % des dossiers seraient traités en un seul échange.

Effondrement de la délégation d’assurance

Les professionnels du courtage et les acteurs du marché des assurances alternatives ne font pas le même constat. S’ils confirment que la substitution d’assurance emprunteur est plus facile depuis l’entrée en vigueur de la loi Lemoine en 2022, ils constatent, à l’inverse, un recul de la délégation d’assurance. Rappelons que le changement d’assurance peut se demander à deux moments :

  • lors de la signature du prêt, on parle alors de délégation d’assurance ;
  • ou plus tard, une fois le crédit conclu, il s’agit alors de substitution d’assurance.

Securimut, un prestataire de changement d’assurance emprunteur, déplore : « La délégation d’assurance s’effondre pour s’établir à 7,5 % des nouveaux crédits, soit deux fois moins que la part des contrats d’assurance alternatifs sur les crédits en cours. » Seuls les ménages les plus favorisés, disposant d’un réel pouvoir de négociation face au banquier, peuvent obtenir une délégation d'assurance lors de la signature du prêt. Conséquence : la part globale des assurances externes, souscrites en dehors des banques, serait ainsi passée de 15,3 % en 2021 à 16 % en mai 2023, soit une progression de 0,7 % en 2 ans. Rien d’extraordinaire ! La facilité grandissante à changer d’assurance emprunteur ne semble ainsi, en pratique, pas avoir fait exploser les demandes. Pourtant, dans la majorité des cas, le prix des assurances alternatives reste toujours moins cher que celui des contrats de groupe (dont certains ont d’ailleurs vu leurs prix baisser). L’UFC-Que Choisir met à disposition des consommateurs un calculateur qui permet de se faire une idée des économies réalisables dans chaque situation.

Scrutez les clauses d’exclusions des contrats sans questionnaire médical

Les professionnels du courtage immobilier alertent par ailleurs sur un nouveau phénomène : l’insertion dans les contrats d’assurance emprunteur proposés par les établissements bancaires de nouvelles clauses d’exclusions. Certaines compagnies prévoient désormais d’annuler ou de réduire la prise en charge des pathologies antérieures à l’adhésion, lorsque l’assuré n’a pas répondu à un questionnaire médical. Pour faciliter l’accès au crédit des personnes malades, la loi Lemoine a prévu, pour toutes les personnes de moins de 60 ans, en cas de souscription d’un crédit inférieur à 200 000 €, qu’aucun questionnaire médical ne pourrait plus être demandé.

Cette protection risque aujourd’hui de se retourner contre les emprunteurs concernés. Ces derniers ne seraient, en effet, plus couverts en cas de problème lié à une maladie ancienne. Concrètement, les clauses prévoyant que les « suites, conséquences et récidives des maladies dont on est atteint avant l’adhésion » ne sont pas prises en charge, doivent être traquées. En cas de présence de l’une de ces mentions, il faut impérativement tenter de trouver un contrat alternatif ne présentant pas ces exclusions, ou de négocier leur retrait.

Élisa Oudin

Élisa Oudin

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